Bientôt devenu célèbre dans la Béotie, toujours consulté, il (Tirésias) rendit toujours des oracles certains. La blonde Liriope fit la première épreuve de son adresse à pénétrer dans l'obscur avenir. C'est elle dont le Céphise arrêta les pas dans ses flots tortueux, elle qu'il soumit à sa violence, et qu'il rendit mère d'un enfant si beau, que les Nymphes l'aimaient déjà dès sa plus tendre enfance. Narcisse était son nom. Tirésias, interrogé si cet enfant atteindrait une longue vieillesse : « Il l'atteindra, répondit-il, s'il ne se connaît pas ». Cet oracle parut longtemps frivole et mensonger; mais l'aventure et le genre de mort de Narcisse, et son fatal délire, l'ont trop bien expliqué.
Déjà le fils de Céphise venait d'ajouter une année à son quinzième printemps : il réunissait les charmes de l'enfance aux fleurs de la jeunesse. Les Nymphes voulurent lui plaire; plusieurs jeunes Béotiens recherchèrent son amitié; mais à des grâces si tendres il joignait tant de fierté, qu'il rejeta tous les voeux qui lui furent adressés.

OVIDE , Métamorphose (III, 339-355) Traduction: GT Villenave