TACITE

TACITE (P. Cornelius Tacitus), historien latin, né à Rome entre 54 et 56, mort vers 120 de notre ère Il fut l'élève d'Aper et de Julius Secundus, peut-être de Quintilien, et l'ami de Pline le Jeune. D'une famille noble il exerça, sous Vespasien, Titus, Domitien, Nerva, Trajan, d'importantes fonctions : questeur, préteur, consul, proconsul.

Tacite avait écrit des plaidoyers très réputés, aujourd'hui perdus. Nous possédons de lui : Dialogue des orateurs, écrit vers 81 et publié vers 95 ; il traite trois questions distinctes : Mérites comparés de l'éloquence et de la poésie ; L'éloquence est-elle en décadence? ; Causes de son déclin. (On a contesté à Tacite la paternité de cet ouvrage ; il paraît cependant qu'il doit lui être attribué) ; Vie d'Agricola, éloge historique de son beau-père, écrit en 98 ; Moeurs des Germains (98), ouvrage d'une singulière profondeur, où les coutumes germaniques sont si bien pénétrées qu'on reconnaît presque dans les institutions du moyen âge des traits observés par Tacite (il y a en outre ici une satire voilée de la corruption romaine, à laquelle l'auteur oppose la pureté barbare); les Histoires, qui allaient de la chute de Néron à l'avènement de Nerva (69-96), et dont il ne reste malheureusement que les quatre premiers livres avec le commencement du cinquième, embrassant seulement un espace de deux années (69 et 70) ; les Annales, qui, bien que composées après les Histoires, retracent cependant la période précédente : celle qui va de la mort d'Auguste à la chute de Néron. Une grande partie de cet ouvrage manque également.

On a été très sévère pour Tacite historien. Il est certain que chez lui, comme chez tous les historiens romains, le souci littéraire l'emporte souvent sur celui de la stricte exactitude. Il n'a pas toujours été impartial lorsqu'il accusa l'Empire (forme de gouvernement dont il reconnaît d'ailleurs la nécessité), il oublie la «  paix romaine » et la sage administration des provinces. Il faut donc se défier de lui quand il s'agit du détail des faits. Mais, dans l'ensemble, il a su comprendre et juger son époque avec une rare profondeur. Sans doute, il est pessimiste et on a pu lui reprocher de ne voir dans ses contemporains et dans la nature humaine que les plus basses passions. Mais il a dit lui-même qu'il peignait une époque « féconde en catastrophes, cruelle même pendant la paix ». Il exalte la vertu quand il la rencontre. Enfin, son amertume lui donne une admirable pénétration pour analyser les raisons cachées des événements et les ressorts secrets des âmes. Tacite a été un peintre admirable. Son Histoire est une admirable résurrection : personnages, foules, harangues, batailles, révoltes, vivent d'une vie dramatique et intense. Pour y réussir, il s'est créé un style profondément personnel, où il finit par ne plus rien rester de la syntaxe de l'époque cicéronienne, et de la construction savamment ordonnée du grand orateur, où tout obéit à la nécessité d'exprimer avec une énergique fidélité les visions et les émotions de l'auteur.

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